Voyager avec un enfant autiste, compliqué mais gratifiant!
Par Emmanuelle Assor
Vous êtes-vous déjà demandé comment voyager avec un enfant autiste qui n’aime ni le dépaysement, ni le changement et encore moins les imprévus? Comment casser la monotonie du quotidien et ouvrir l’horizon d’enfants qui aiment tant leurs routines? Personnellement, après plusieurs années de renoncement face à ce qui me paraissait un trop grand défi, j’ai décidé que nous allions voyager coûte que coûte. L’envie de revoir ma famille à l’étranger et de retrouver la mer, cette mer qui fait tant de bien à l’âme, était plus forte que toutes mes appréhensions.
Notre premier voyage en avion fut épique. Je pensais avoir préparé mon enfant au fait que nous allions en Floride en lui montrant des photos de l’aéroport, du logement que j’avais choisi et de la plage. J’avais prévu de lui donner des jouets et des collations dans l’avion. J’avais rempli son iPad de jeux adaptés à ses goûts particuliers. J’étais inquiète mais je n’avais aucune idée concrète de ce qui nous attendait! Dès le premier retard dans l’avion, j’ai dû expliquer aux autres passagers que mon fils était autiste et nerveux. À partir de ce moment, la tension est descendue entre nous et les autres passagers.
Je réalise aussi que je n’avais pas considéré toutes les étapes à franchir avant d’arriver à destination. En effet, pour une personne neurotypique, ces étapes se franchissent naturellement même s’il est souvent pénible d’accepter des délais, des douaniers trop zélés, d’être encerclé de gens partout... Mais on se raisonne, on se dit que tout ceci a une fin. Ainsi, j’avais oublié d’expliquer à mon fils que voyager est souvent frustrant et qu’il faut s’armer de patience pour : prendre un taxi vers l’aéroport, s’enregistrer au comptoir de la compagnie aérienne, attendre, passer la sécurité, attendre, monter dans l’avion sans wifi, attendre que l’avion atterrisse, attendre pour récupérer les bagages, attendre un autre taxi pour aller à l’hôtel... Les sources de stress sont nombreuses et déboussolantes mais comme on dit en anglais : « Practice makes perfect ». À force de voyager, mon enfant (maintenant ado) a appris qu’il faut traverser ces étapes, une à la fois, calmement, pour se rendre ailleurs et découvrir le monde.
Pour réussir nos déplacements, je prévois chaque voyage minutieusement : je cherche des vols sans escale avec des horaires raisonnables, des logements avec une cuisine, car il ne mange que certaines choses. Avant de partir, mon mari lui fait des jolis dessins de ce que nous allons faire, je lui montre des photos de l’endroit où nous allons et je prévois des activités qui lui plaisent. En 10 ans, nous avons vu tant d’aquariums et de zoos, que je suis capable de nommer différentes sortes d’animaux et poissons tropicaux! Nous avons visité des musées et des planétariums, des lieux historiques et pris des Big Bus dans plusieurs villes du monde. J’ai découvert que mon fils aime se déplacer d’un endroit à l’autre tant que ça bouge! Il aime les trains, les bateaux, les autobus et les tramways, et il accepte les avions malgré les retards, toujours difficiles à accepter mais inévitables.
En bout de ligne, j’ai dû m’adapter à l’univers de mon enfant et non l’inverse. Avec sa façon unique de voir le monde et de vivre sa vie, il m’a menée dans des sentiers inexplorés où jamais je ne serais allée. L’an dernier, en voyage au Mexique, nous sommes allés visiter une grotte remplie de stalactites. C’était l’idée de mon fils et c’est même lui qui a marché devant mon mari et moi avec sa lampe frontale, nous guidant dans le noir. La leçon à retenir de nos périples? Ne jamais sous- estimer nos enfants, car parfois ce sont eux qui nous montrent le chemin.